Embrasser le changement : Etes-vous plutôt Héraclite ou Parménide ?

Quel immense soulagement psychophysiologique que de s’asseoir devant une haute falaise face à l’océan, devant un menhir ou un arbre centenaire. Vous ressentez instantanément leur incroyable pouvoir à apaiser ce petit hamster qui tourne fou en vous».

La même semaine, deux tableaux, quel contraste !

Le premier est un cas vécu, le seconde est une réflexion de Sylvain Tesson, ce voyageur poète et aventurier, entendu lors de la belle soirée du 14 mars 2024 (Les Grandes Conférences Liégeoises). Cet homme est mu par un besoin fondamental de liberté et de s’extraire du «vacarme des hommes et de la bêtise des chiffres».

Et finalement, qu’avons-nous envie de vivre ? que choisir ? faut-il choisir ?

Plus encore depuis l’après Covid, la littérature spécialisée en management foisonne sur le thème de l’adaptabilité comme compétence absolument nécessaire à avoir et à développer de nos jours et pour les années à venir, en réponse à la vitesse des changements, à l’imprévisibilité et à la complexité du monde.

L’acronyme VUCA, vulgarisé pour décrire notre mode moderne, impose d’être toujours sur ses gardes. C’est notre nouveau mode de vie.

Choisir Héraclite ou Parménide

Ce sont deux philosophes presque contemporains que la pensée oppose :

Héraclite (550-480 av JC) développe une philosophie fondée sur l’idée que tout est impermanent. Sa vision du monde, s’appuie sur la transformation incessante des êtres et l’écoulement perpétuel de toute chose. « On ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve ».

Avec Héraclite, nous sommes préparés à changer plusieurs fois d’emploi, à reprendre une formation, àswitcherrapidement d’un projet à un autre, à devenir entrepreneurs, à lancer un nouveau business, à échouer, à rebondir... Dans le monde du travail, ce sont les personnalités agiles, les expatriés, les gestionnaires de crises, les start-uppeurs, les amoureux de l’innovation, du change management…

Parmenide (515-450 av JC) développe, à l’inverse, une pensée de l’immuable, de ce qui est fixe, de ce qui ne pourra jamais bouger. Il considère que nos sens sont trompeurs et qu’une multitude de choses sensibles ne sont que pures illusions. Le seul vrai Être est "Un", infini et indivisible. L’Être ne deviendra jamais ce qu’il n’est pas : il ne peut devenir, ni changer. Il est donc immuable et éternel.

La pensée de Parménide résonne avec notre besoin de stabilité, de réassurance, de garder notre travail, nos relations, notre famille, de retrouver notre foyer chaque soir et nos collègues chaque matin, tout comme de mener des projets jusqu’à son terme et de rester loyal à son entreprise.

Que choisir entre l’exhalation du changement et le confort de la stabilité ?

Comme Sylvain Tesson, j’observe que « cette question nous tiraille, nous écartèle ». Elle est de l’ordre du dilemme. C’est choisir entre « Pénélope ou Calypso », « le chien et le loup de La Fontaine », « l’aventure ou la sécurité » ».

La réponse ne se trouve-t-elle pas dans l’oscillation entre ces deux états ?

Le mouvement et le repos en Management

Prendre soin de ses équipes et de soi-même à travers ces deux écoles serait donc l'équilibre subtil entre la volonté d'apprivoiser le changement, tout en ramenant et en consolidant le fixe :

Apprendre à embrasser le changement :

• Etre capable de challenger constamment la vision, réorienter rapidement les actions, les objectifs.
• Veiller à sa formation continue et son employabilité, ainsi que celles des collaborateurs pour ne pas se laisser surprendre par les évolutions (technologiques) trop rapides, créatrices de ruptures.
• Développer l'adaptabilité comme une force. Vivre le mouvement comme source d’énergie, d’inconnu, de joie et d’aventure.

Ramener et consolider le fixe :

• Développer des aires de repos, physiques et encore plus, mentales.
• Bloquer du temps ensemble et du temps pour soi pour poser les idées, échanger, créer du lien, s’entraider.
• Sécuriser et faire vivre les valeurs communes, solides, fixes, inébranlables.
• Ramener constamment la perspective et le projet collectif à long terme, au-delà des bifurcations rapides.

Ceci, en veillant toujours à avoir quelqu'un à qui parler,ensemble dans le même bateau !

Ecrit par Christine Thioux

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